lundi 21 mai 2012

Les saisons théâtrales au XVII : « Les temps du théâtre : Organisation et déroulement de la séance », Fabien Cavaillé in La Représentation théâtrale en France au XVIIe siècle, 2011


« Les temps du théâtre : Organisation et déroulement de la séance », Fabien Cavaillé
in La Représentation théâtrale en France au XVIIe siècle, 2011

I.                    Saisons et horaires de la séance théâtrale
Professionnalisation en cours entre le milieu du XVIe et le XVIIe ; multiplication des théâtres à Paris.
Le théâtre devient une activité quasi quotidienne – il cesse d’être un divertissement réservé aux temps extraordinaires de la fête.
Régularité, banalité

Saison plein et hors saison du théâtre

Au XVIIe, on donne des représentations sur toute l’année ou presque. Mais opposition entre l’hiver et l’été, en particulier à Paris.

Hiver : de la Toussaint à Pâques : temps des divertissements.
Dans la 1ère moitié du XVIIe, les troupes s’arrêtent au Carême-prenant ou à Mi-Carême.

Eté : consacré aux tournées provinciales.
Ensuite : l’arrêt de la saison théâtrale se fixe : du vendredi précédant les Rameaux au mardi qui suit Pâques.
Hiver : grande saison théâtrale, de Noël à la période de Carême, qui coïncide avec la période du carnaval, de la Foire Saint-Germain (de février à la semaine de Pâques).
Hiver : période d’afflux de la population à Paris (militaires, bourgeois plus présents, le roi et la Cour)
Eté : dans le 1er tiers du siècle, saison des tournées provinciales, habitude qui se perd au fur et à mesure que la vie théâtrale devient fixe à Paris.
Par ailleurs, pour Chappuzeau, l’hiver : le temps des créations ; l’été, celui des reprises.

En province, d’où sont absentes les troupes fixes, les périodes théâtrales coïncident avec le temps des fêtes et avec les grandes occasions (venue d’un grand personnage, tenue des Etats d’une province…).

dimanche 20 mai 2012

Les mystères : in « Le théâtre des « bonnes villes » », Jean-Pierre Bordier, in Le Théâtre en France, Alain Viala, 1996-2009


Les Mystères – in « Le théâtre des « bonnes villes » », Jean-Pierre Bordier, in Le Théâtre en France, Alain Viala, 1996-2009

Les Acteurs

Au XVe, acteurs professionnels : très rares, compagnies ou bandes, essentiellement pour jouer les farces (4 acteurs).
Instabilité et vie itinérante.

Mais la plupart des acteurs sont amateurs.
Pour les mystères qui requièrent de 100 à 200 interprètes, les organisateurs lancent des appels à candidats, distribuent les rôles (rouleaux) et font répéter.

Presque toujours des hommes (sauf exception) ; les enfants jouent aussi : en 1539, le fils d’un bourgeois de Paris joue devant la famille royale 3 rôles : Jésus enfant, un jeune habitant de Jérusalem et l’âme de Jésus descendant aux Enfers, soit 3000 vers.

Les acteurs sont recrutés parmi les classes moyennes, marchands, artisans, compagnons, parfois aussi clercs et prêtres.

Pas de dédommagement financier (sauf exception très rare)
Jouer est un honneur

Les confrères de la Passion et les autres sociétés

Paris : monopole des Confrères de la Passion, association spécialisée dès le XIVe siècle – Charles VI leur accorde en 1402 l’exclusivité.
Spectacle en extérieur (cours d’hôtel particulier, lieux publics)
Evolution du rôle des confréries : au départ, montent et jouent eux-mêmes puis deviennent des entrepreneurs de spectacles.

Même modèle répandu dans toute l’Europe :
« les sociétés joyeuses », groupes de célibataires (cf. charivaris)

Les mystères : conditions matérielles de la représentation (d'après la préface du Mystère de la Passion, Folio)


Arnoul Gréban – Le Mystère de la Passion (Folio, 1987)

Préface (M. de Combarieu du Grès et J. Subrenat)

II. Les conditions matérielles de la représentation

Caractère urbain des représentations, dû aux contraintes inhérentes au genre :
Nécessité de temps, d’argent, d’hommes

Place de la province, en particulier de la France du nord : Bourges, Poitiers, Orléans, Metz, Nancy, Semur, Amiens, Beauvais et, hors du royaume, Mons, Valenciennes.

Initiative d’un mystère :
-          Les confréries constituées en vue de ce type d’activités – c’est-à-dire contrairement aux autres confréries des XIVe-XVe siècles, indépendamment de l’appartenance professionnelle.
-          Les municipalités, associées au financement (
Dimension économique : coût important pour monter un mystère mais possibilité de rentrée financière importante et de dynamiser la vie économique.
Question de prestige pour la ville

Les places sont payantes, plus ou moins chères selon la place, selon le spectacle.

Les acteurs :
-          pas professionnels, pas rémunérés – parfois un remplaçant est payé pour celui qui joue.
-          pas de femmes
-          Nombre d’acteurs : de l’ordre de 300 pour la Passion de Gréban
-          Capacité de mémorisation des acteurs amateurs.
-          Appartenance sociale : liée aux contraintes que fait peser l’investissement au niveau du temps ; nécessité d’une certaine disponibilité :
Notables, maîtres artisans, prêtres,

-          Sont payés les « conducteurs de secrez », c’est-à-dire les responsables des effets spéciaux et les machinistes ; les peintres, les terrassiers, les charpentiers

Le texte : commandé à un « fatiste », qui se livre souvent à un travail d’arrangeur.
1496 : les habitants de Seurre en Bourgogne, commandent un Mystère en l’honneur de saint Martin – 8 000 octosyllabes rédigés en six semaines.
Le texte est loué ou vendu aux organisateurs de spectacle.

Public :
le fait que les places étaient payantes exclut que tous pouvaient y assister – un quart du salaire journalier d’un ouvrier.
Cependant ce sont des spectacles qui réunissent une grande partie de la population

Déroulement de la représentation :

-          Préparation : de quelques mois à un an (la Passion donnée à Mons)
-          La veille du spectacle : la troupe parcourt la ville en cortège
-          Le spectacle se déroule de façon pratiquement continue de 8 heures du matin à 5 heures de l’après-midi, avec une pause pour le déjeuner et aussi en cours de matinée et d’après-midi.
-          Le spectacle peut s’étendre sur plusieurs jours, selon la longueur des Mystères.
-          Public nombreux : entre 1 500 et 4 000 spectateurs.

Chronique de la fin du XVe siècle, à propos de la représentation du Mystère des Actes des Apôtres :
« les jeux [furent] excellemment joués par des hommes graves et qui savaient si bien feindre par signes et gestes les personnages qu’ils représentaient que la plupart des assistants jugeaient le chose être vraie et non feinte. »

Spectacles qui assurent le lien entre le temps christique et le temps présent : à Valenciennes en 1547, les spectateurs réclament leur part des pains miraculeux multiplés par le Christ : « les cinq pains furent semblablement multipliés et distribués à plus de mille personnes ; nonobstant quoi, il y en eut plus de douze corbeilles de reste. »[1]

 [1] Textes cités dans Henri Rey-Flaud, Le Cercle magique, essai sur le théâtre en rond à la fin du Moyen-Âge, 1973.



[1] Textes cités dans Henri Rey-Flaud, Le Cercle magique, essai sur le théâtre en rond à la fin du Moyen-Âge, 1973.

mercredi 9 mai 2012

Les Mystères au XVIe, prise de notes d'après l'histoire de la littérature française de chez Fayard


Les Mystères au XVIe – d’après Littérature française, La Renaissance I – 1480-1548, Giraud et Jung, Arthaud, 1972

-          distinction entre le théâtre des mystères et le théâtre aristotélicien
Ø        Théâtre aristotélicien : réglé par la notion de mimèsis, l’acteur s’identifiant au personnage et l’espace scénique se donnant comme représentation du monde.
Scène : univers clos dont l’acteur ne saurait sortir.
Ø        Théâtre non aristotélicien du Moyen Âge : l’acteur ne s’identifie pas au personnage, il le montre ; la scène n’est pas le monde, elle le signifie.
Dimension figurale de ce théâtre.
De là, l’importance de la monstre, parade qui précède le specacle et l’ouvre.
Absence de dimension psychologique des personnages. Le personnage se conforme fondamentalement à son « état ». (cf. Instructif de la Seconde Réthorique, in Le Jardin de plaisance et fleur de Réthorique, vers 1500)
Théâtre non littéraire, n’étant pas fait pour être lu.
Théâtre dont les sujets sont donnés : Nativité, Passion, Actes des Apôtres, Miracle, Vies des saints.
Texte mouvant, soumis à révision avant chaque représentation ; les remaniements sont d’abord dictés par un souci empirique, tirant profit des réussites acquises lors des représentations précédentes.

-          Question de la mort du genre
Ø        Expansion infinie des œuvres (1507 : la Passion compte 65 000 vers)
Ø        Apparition lente d’un théâtre plus régulier, plus statique.
qui s’accompagne de l’exclusion d’un certain public : le nouveau public devient un théâtre de classe.
Exemple de la représentation de Térence en latin au palais épiscopal de Metz en 1502 : le menu peuple, ne comprenant pas le latin, oblige les acteurs à interrompre le spectacle.
Les mystères : s’adresse à la foule ; les acteurs sont des amateurs, nobles ou bourgeois. Théâtre fourre-tout (il y en a pour tous les goûts)
Dimension spectaculaire.
Ø        Les éléments profanes prennent de plus en plus d’importance.
Poids que prennent les représentations dans la vie de la cité :
1541 : les Confrères de la Passion de Paris : succès de la représentation pendant 35 jours des Actes des Apôtres. Le procureur général refuse l’autorisation pour la représentation du Vieux Testament l’année suivante.

Ø        Le reflux : 1539, François 1er assiste au Sacrifice d’Abraham, en 1543, à la Conception et Annonciation de Marie.
1548 : Interdiction aux Confrères de la Passion de jouer des mystères à sujet religieux, par le Parlement de Paris. Interdiction suivie d’autres en province.
Ø        Facteurs extérieurs :
²       goût des lettrés humanistes, condamnant les extravagances de la foule.
²       Questions religieuses : les évangéliques et les protestants sont hostiles à tout ce qui est apocryphe ou profane ; les catholiques craignent les hérésies.
²       Edition de 1538 des Actes des Apôtres : souci constant d’éliminer les éléments apocryphes, les gloses, les sens mystiques et de se rapprocher de la vérité historique.
²       Evolution entre les mystères du XVe et du XVIe : Dieu le Père et Jésus n’apparaissent plus aux hommes.

-          Cependant, le genre reste vigoureux
Ø        Mystère de la Passion de Jean Michel, remaniement de la Passion de Gréban.
Ø        Plusieurs mystères écrits par des auteurs importants :
²       Le Mystère de Saint Martin, André de La Vigne
²       Vie Monseigneur sainct Loys, de Pierre Gringore, pièce plus historique qu’hagiographique – proche du Mystère du siège d’Orléans – qui ne connaissent que peu de succès.
²       Istoire de la destruction de Troye, grand succès (une douzaine de manuscrits et autant d’éditions en 1484 et 1544) de Jacques Milet, composé vers 1450-52.
²       Mystère de saint Quentin de Jean Molinet, « véritable fourre-tout »
Tout semble représentable ; tout est représenté.
« la tradition ne lègue plus des valeurs mais uniquement un immense répertoire « neutre » ».
Dimension de fantaisie verbale.

Un article sur le théâtre de collège au XV et XVIe siècles

LE THEÂTRE DES COLLEGES, LA FORMATION DES ETUDIANTS ET LA TRANSMISSION DES SAVOIRS AUX XVe ET XVIe SIECLES

de Matthieu Ferrand