mercredi 9 février 2011

Qui a peur de l'imitation ? Pourquoi la fiction, chap.1, Jean-Marie Schaeffer

Pourquoi la fiction ? Jean-Marie Schaeffer, Seuil, 1999

Quelques trucs autour :
- Un compte rendu sur Fabula, de Claire Montalbetti.
- Un entretien avec J-M. Schaeffer, sur Vox poetica

Chapitre 1 "Qui a peur de l'imitation ?"

- point de départ : un conte de Marcel Aymé, "Le Loup" dans les Contes bleus du chat perché. Histoire qui tourne mal : le loup jouant au loup avec deux petites filles finit par se prendre au jeu et les manger.
Récit exemplaire de l'ambivalence face à la fiction "mélange de fascination et de méfiance".
Méfiance : inquiétude devant le fait de pouvoir "nous laisser submerger par des simulacres".

Généalogie de l'attitude antimimétique :
- Platon
- iconoclasme byzantin
- mise en garde janséniste contre le théâtre et la peinture figurative.
- réflexions du romantisme d'Iéna sur la poésie.
- discours disqualifiant la photographe au XIXe
- discours des inventeurs de la peinture abstraite (Kandinsky, Mondrian)
- critère de disqualification utilisé par une grande partie de la critique dans le domaine des arts plastiques.
- théâtre épique de Brecht
- réticences face au développement des médias numériques.

Opposition entre deux attitudes antimimétiques :
- un antimimétisme radicale : exclure toute pratiques mimétiques (ne retenir que la peinture abstraite, l'art conceptuel, la poésie non-narrative)
- un antimimétisme tempéré : "neutraliser la pertinence de la fonction mimétique à l'intérieur de même des arts de la représentation".
  • la peinture abstraite nous a révélé l'essence de la peinture
  • "la poésie en tant que pur jeu linguistique est censée réaliser l'essence de l'art verbal"
Attitude antimimétique :
à la fois "lutte morale" et "défense de l'excellence artistique"
  • discours de pédagogue : éclairer et amener "les habitants de la caverne" à la raison.
  • discours dénonciateur : dénoncer le "loup imitateur" qui cherche à "corrompre les coeurs et aliéner la raison"
  • discours de la distinction : tracer une ligne de démarcation entre "l'art au sens noble" et des pratiques plus ou moins douteuses.
Pour Schaeffer, il y a une permanence des thèses antimimétiques qui trouvent leur expression première chez Platon. En cela, il est proche de Goody.
L'évolution se situe au niveau des cibles de ces discours ; rapport notamment à la plus ou moins grande légitimité culturelle des arts (les arts de naissance récente, reposant sur des procédés techniques - thèse de la rupture : "les médias numériques abolissent la distinction du vrai et du faux en tant que telle et échappent à la distinction "traditionnelle" entre la fiction et la véridicité référentielle." Discussion de la thèse de la rupture que Schaeffer réfute)

Mise en perspective historique :
le développement des médias numériques
- Renaissance inaugurant un cycle de développement des arts mimétiques.
- Antiquité : "à partir de la moitié du Ve siècle environ, il y eut en Grèce une véritable poussée de fièvre mimétique, dans le théâtre tout autant qu'en peinture : développement du drame réaliste d'Euripide (480-406), invention de la perspective linéaire et création de coulisses théâtrales illusionnistes, invention du dégradé par Apollodore d'Athènes (vers 420) (skiagraphia), peinture naturaliste de Zeuxis, psychologisme expressif de Parrhasios.
(en passant, un site qui semble fort fort intéressant sur la peinture antique avec notamment les textes platoniciens condamnant la skiagraphia)

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