Chapitre 2 : De la conférence de Berlin à la mise en place du système scolaire en AEF.
Situation au début des années 1880 : les puissances européennes ne sont encore implantées que sur quelques points sur les côtes : Français au Sénégal et au Gabon, les Portugais en Angola, les Britanniques en Gold Coast, au Cap etc.
Reconnaissances vers l’intérieur des terres : apparition de conflits – Stanley/Savorgnan de Brazza au Congo.
La conférence de Berlin et ses retombées linguistiques
15 novembre 1884-26 février 1885 : Allemagne, Autriche-Hongrie, Belgique, Danemark, Espagne, France, Grande-Bretagne, Pays-Bas, Portugal, Russie, Suède, Empire Ottoman.
Deux approches opposées :
- Affirmer la liberté du commerce et de la navigation en Afrique (Bismarck)
- Délimiter des colonies pour les pays européens (Ferry)
Traité :
- Affirmation de la liberté du commerce dans le bassin du Congo
- Interdiction de la traite des esclaves
- Neutralité des territoires compris dans le bassin conventionnel du Congo
- Liberté de la navigation sur le Congo et le Niger
- « Les puissances signataires du présent Acte reconnaissent l’obligation d’assurer, dans les territoires occupés par elles, sur les côtes du continent africain, l’existence d’une autorité suffisante pour faire respecter les droits acquis et, le cas échéant, la liberté du commerce et du transit dans les conditions où elle serait stipulée. »
Défense du droit à l’occupation territoriale et de la liberté de navigation.
Découpage del’Afrique en zones d’influence à travers des traités bilatéraux ; découpage revu lors du Traité de Versailles (1919) – l’Allemagne renonce au Cameroun, au Togo et à l’Afrique de l’Est (Rwanda, Burundi, Tanzanie)
1895 : création de l’AOF – capitale : Saint-Louis
1910 : création de l’AEF
Influence du découpage en colonies sur l’avenir des langues : le peul, langue importante de l’Afrique de l’ouest est minorisée par le découpage dans chacun des pays.
Nouvelle ère commence pour l’enseignement : Edgard de Trentinian (1851-1942) séjourne au Sénégal de 1895 à 1898 : multiplication des écoles ; question de méthodologie.
Le modèle français et le rôle de l’Alliance française
1881-1882 : mise en place du cadre législatif de l’école primaire obligatoire.
L’école républicaine dès l’origine est au service de la centralisation linguistique : faire de l’Hexagone un territoire monolingue.
1883 : Alliance française, « association nationale pour la propagation de la langue française dans les colonies et à l’étranger ».
Son comité d’administration met en évidence ses liens avec l’entreprise colonial :
Trois présidents d’honneur : - Faidherbe,
- Lavigerie, archevêque d’Alger
- Ferdinand de Lesseps
« a pour objet de répandre la langue française hors de France, et principalement dans nos colonies et dans les pays soumis à notre protectorat ».
Deux méthodologies sont envisagées :
1. « méthode classique », destinée aux « centres civilisés » : épeler, lire, écrire, orthographier.
2. « méthode expéditive », dans les « écoles indigènes », les postes avancés : enseigner les mots usuels, des phrases très simples. Pas d’écrit.
La mise en place de l’enseignement colonial
1903 : rapport sur l’enseignement du français en AOF.
Tableau catastrophique de la situation générale : absence de résultat due à une absence de coordination des efforts – pas d’unité des méthodes utilisées.
Pb des écoles des congrégations dans leur rapport aux écoles coraniques.
Volonté de l’administration coloniale de contrôler les écoles coraniques (les soumettre à autorisation, obligation d’enseignement du français, ...).
Selon William Ponty, en 1910 : à Saint-Louis, 200 élèves des écoles françaises/ 1300 élèves d’écoles coranique.
1903 : création par le gouverneur général Roume d’un service unique centralisé de l’enseignement laïque en AOF : enseignement gratuit, mais pas obligatoire
Système pyramidal :
1. Ecole de village (niveau CP, CE) : langue française, hygiène, calcul. Au minimum, 40 élèves.
2. Ecole régionale (CM) : avec internat, préparer les meilleurs éléments des écoles de village aux écoles commerciales, aux cours d’apprentissage.
3. Ecole urbaine, avec programme de la métropole, Certificat d’études primaires. Début 1910 : 4 écoles au Sénégal (Saint-Louis, Gorée, Dakar, Rufisque)
4. Ecoles fédérales : techniciens, cadres auxiliaires.
5. Ecole normale d’AOF : former des instituteurs locaux – réduire les coûts.
Mise en place d’un corps d’inspecteurs de l’enseignement.
Croissance rapide du nombre des enseignants sénégalais.
1904 : 28 contre 57
1909 : égalité
1911 : 67 contre 41
1913 : 75 contre 38
Comme gouverneur général, William Ponty (1866-1915) succède à Roume.
Accent mis sur l’enseignement de la langue française : jusque dans les villages. Politique assimilationiste, liant la mission de l’école aux valeurs humanistes.
Mise en place d’un système d’inspection.
Georges Hardy, inspecteur, crée le Bulletin de l’enseignement en AOF.
Mise en place progressive d’un système qui se reproduit à l’identique en AEF.
Avant 1914, on note encore une concentration des écoles le long de la côte et du cours du fleuve Sénégal.
L’école normale William-Ponty
Ouverte en 1903, au départ destinée à former à la fois des instituteurs et aussi des interprètes, des cadres et des chefs.
1913 : 52 élèves, cinq internats. 3 ans d’études couronnés par un « certificat d’aptitude à l’enseignement » (valable en AOF mais pas en France).
1921 : elle absorde l’école Faidherbe : forme aussi des agents de l’administration et des candidats à l’école de médecine.
1946 : divisée en 3 sections :
- Préparation au bac, pour accéder à l’université.
- A l’école africaine de médecine et de pharmacie de Dakar, à l’école de vétérinaire de Bamako
- Formation des instituteurs.
Nombre des futurs dirigeants au temps de l’indépendance sortiront de cette école ; écrivains.
Ecole uniquement de garçons.
1938 : création d’une école de jeunes filles et d’une école de sages-femmes (en 1956, 1296 jeunes filles auront été admises, 990 diplômées)
Mamadou et Bineta
Elaboration de méthodes spécifiques.
Influence du modèle narratif du Tour de France par deux enfants (1877) :
1916, Moussa et Gigla, histoire de deux petits Noirs méthode de français utilisée jusqu’aux années 50. A la fin de l’ouvrage les deux héros deviennent agriculteur et soldat.
Mamadou et Bineta (1930), d’André Davesne (1898-1978) – partisan de la méthode Freinet, enseigne à Bamako, Brazzaville, au Sénégal jusqu’en 1939 avant de poursuivre sa carrière comme inspecteur en France.
Toute une série couvre l’ensemble du cycle primaire.
Postulation d’une culture franco-africaine un peu artificielle – méthode qui propose aux maîtres une répartition hebdomadaire des cours et des conseils pédagogiques : vise autant à former les maîtres que les élèves.
Longévité exceptionnelle de l’ouvrage.
Traité de législation coloniale de Paul Dislère : la différence de la place accordée à l’enseignement en AOF entre la 1ère édition (1886) et la 3ème (1906) montre l’évolution de la situation.
Mise en place d’un système centralisé, institant sur l’utilisation de la langue française.
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