Dossier centré sur la période 1660-1670 :
« moment paroxystique dans le conflit traditionnel entre les Eglises
chrétiennes et le théâtre. »
l Spécificité du contexte : transformation de la nature même des
spectacles théâtraux :
Ø A l’époque des Pères de l’Eglise : « spectacles grossiers liés au
paganisme »
Ø Moyen-Âge : lien entre la piété populaire et les représentations
théâtrales.
Ø Rénovation du théâtre dans la 1ère moitié du 17e
siècle. Mise en place d’un théâtre purifié.
Déclaration de Louis XIII, « reconnaissant aux comédiens une
respectabilité qui leur était souvent contestée » (1641).
l « La grande offensive contre le théâtre des années 1660-1670
Ø Nombre important d’écrits
Ø Qualité des textes : notamment Nicole « qui prend acte de la
moralisation du théâtre et justifie, par une nouvelle argumentation, l’immuable
répugnance des valeurs chrétiennes à l’égard de la scène théâtrale ».
Ø Qualité des victimes :
² Corneille
² Racine – querelle des Visionnaires.
² Molière – Tartuffe et Dom Juan.
Enjeu de cette polémique :
La violente polémique de Nicole et de Varet contre le théâtre (et d’abord
contre Corneille) efface près d’un siècle de négociations et de médiations.
(M.Fumaroli, « La querelle de la moralité du théâtre au XVIIe
siècle », Bulletin de la Société
française de philosophie, juill.sept. 1990, p.67.)
« Rompre avec le travail d’affinement des notions
mené par les doctes depuis la Renaissance.
Opposition entre
les efforts de réglementation du théâtre (au plan esthétique mais aussi
moral) : « phénomène accessoire »
et
la réalité profonde du spectacle dramatique, immuable.
Refus de l’approche des doctes, considérée comme métaphysique, c’est-à-dire éthérée et
abstraite.
Le discours que j’ai entrepris appartient à la morale et non pas à la
métaphysique : je veux parler de la Comédie comme on la joue, et point du
tout comme on ne la joue pas. (Conti, Traité
de la Comédie et des Spectacles)
l Dans l’histoire littéraire, privilège accordé aux Maximes et réflexions sur la Comédie (1694) de Bossuet ainsi qu’à
la Lettre à d’Alembert sur les spectacles
(1758).
l Nature de cette querelle : la question religieuse l’emporte évidemment
sur la question esthétique. Cependant,
Ø « Les adversaires du théâtre (...) sont amenés à investir l’art
dramatique d’une grande puissance. »
Ø Richesse argumentaire qui ne se limite pas à la seule dimension morale :
² Niveau poétique
² Anthropologique
² Métaphysique
Diversité des
approches :
² Pour certains, privilège accordé à la question du comédien et du risque
qu’il court.
² Perspective historique pour montrer que malgré la différence de contexte il
y a une permanence de la nature du spectacle dramatique des Pères de l’Eglise
au 17e.
Diversité des
objectifs
² Projet d’une christianisation de la littérature
² Dénonciation de ce projet comme une « illusion dangereuse » :
incompatibilité structurelle entre l’Evangile et la Comédie.
Le
Traité de la Comédie de Pierre Nicole
Question
de la date : le texte « appartient à deux époques »
l La fin des années 1650 par sa rédaction (liée à la publication en 1657 de
la Pratique du théâtre de l’abbé
d’Aubignac)
l 1667, par sa publication
Qualité
et originalité du texte
l Le trait le plus remarquable : l’exclusion des références patristiques
obligées.
On n’a pas voulu rapporter en cet écrit les passages des Pères, et des
Conciles, qui condamnent la Comédie et les spectacles, ni faire voir qu’ils
comprennent aussi bien les Comédies de ce temps que celles du temps des
Pères : parce que l’on peut voir cela en d’autres écrits qui ont été faits
sur le même sujet. (addendum de
l’édition de 1667)
Présence de citation des Pères de l’Eglise mais « jamais à travers
leurs déclarations sur le théâtre. »
Volonté de faire œuvre de moraliste.
Usage très systématique de la Bible : les prophètes, les livres
sapientiaux et poétiques, les psaumes, les épîtres pauliniennes.
A partir des citations de la Bible, élaboration d’une métaphorique
originale (comparaison filée entre les dégoûts spirituels et les dégoûts
alimentaires).
Proximité stylistique avec Saint Paulin de Nole.
l Parallèle avec l’ouvrage de Bossuet :
« Les grands adversaires du théâtre se sont recrutés parmi les
« repentis » » :
Ø Conti, ancien protecteur de Molière.
Ø Nicole, à Port Royal, était « l’expert en esthétique et en théorie
poétique » (Jean Ménard)
Ø Bossuet aurait fréquenté dans sa jeunesse le théâtre.
Bossuet :
Ø critique l’art théâtral essentiellement à travers Molière
Ø proximité avec Rochemont qui condamne l’impitié de Dom Juan et laisse subsister l’idéal d’une tragédie religieuse.
Nicole :
Ø exemples tirés de Corneille
Ø hostilité à toute mimèsis.
Mais l’un et
l’autre condamnent le théâtre en bloc.
Supériorité
argumentative de Nicole : Bossuet pris dans la logique de la réfutation de
Caffaro est obligé de revenir sur l’examen des autorités.
Nicole : libre
du commentaire de texte et du débat.
Possibilité de
considérer avec Georges Couton, le Traité
de la Comédie comme « un comprimé de la morale janséniste » et sa
lecture comme « l’initiation la plus aisée et la plus directe à la
connaissance de l’esprit janséniste. »
Place du concept de
vanité :
« Le théâtre,
de même que la plupart des divertissements, est condamné comme une
démonstration de vanité. Par vanité, Nicole entend toute activité ou préoccupation
qui n’aurait pas pour objet immédiat la recherche du salut et la célébration de
Dieu. « Il faut que toutes nos actions soient rapportées à sa
gloire. » (Nicole) Il s’ensuit une conception de l’existence entièrement
et étroitement tributaire de la foi professée. Nicole ne laisse subsister aucun
espace indifférent, périphérique, où des problèmes accessoires pourraient se
poser dans une perspective laïque. »
« L’idéal de
vie qui se fait jour à l’occasion de cette mise en cause du théâtre est bel et
bien un idéal monastique. »
3 convictions
« éminement représentatives de la spiritualité augustinienne, telle
qu’elle est professée à Port-Royal. »
Ø refus de la vanité
Ø amour exclusif de Dieu
Ø éloge de la retraite
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